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La promesse de l’équinoxe : L’écrivain Claudien Bagayamukwe Cubaka dévoile ce qui se joue entre ombre et lumière

Aujourd’hui, LifeInfos à la joie de rencontrer Claudien Bagayamukwe Cubaka, écrivain et jésuite congolais, actuellement en études à Lyon. Missionnaire au Japon, il puise son inspiration dans les récits de transformation intérieure et dans ces liens humains qui se tissent, se fragilisent puis se reforment au rythme du temps, des rencontres et des silences. À travers cet entretien, nous vous invitons à entrer dans la profondeur de son univers et à découvrir une lecture éclairante de son ouvrage La Promesse de l’Équinoxe, une œuvre où l’intime rejoint l’universel.

Sylvie : Qu’est-ce que les lecteurs devraient retenir du titre La promesse de l’équinoxe ?

Claudien : Les lecteurs devraient retenir l’idée d’un équilibre précaire mais nécessaire. L’équinoxe n’est pas seulement une date astronomique, c’est le symbole de l’égalité parfaite entre le jour et la nuit, entre la lumière et l’ombre. Le titre suggère que la véritable promesse n’est pas celle d’une passion dévorante, mais celle d’une recherche constante de justesse entre deux individualités, entre le rêve et la réalité, et entre l’absence et la présence.

Sylvie : Pourquoi avoir choisi l’équinoxe comme symbole central de votre œuvre ?

Claudien : L’équinoxe représente le moment de bascule, un point de pivot. Dans le roman, il marque le début du pacte (la séparation) et la fin théorique de l’attente. C’est un symbole universel de transition. J’ai choisi ce moment parce qu’il incarne l’égalité parfaite : Léo et Élise ne voulaient pas que l’un soit l’ombre de l’autre. Ils cherchaient une relation « équinoxiale » où chacun brille avec la même intensité, même si cela impliquait paradoxalement de s’éloigner pour grandir.

Sylvie : Quelle “promesse” se cache derrière ce moment d’équilibre entre jour et nuit ?

Claudien : La promesse cachée est celle de la maturité. Au début, c’est une promesse romantique et un peu folle de jeunesse (se retrouver dans dix ans). Mais au fil du récit, elle se transforme. La vraie promesse de l’équinoxe est celle de ne jamais se laisser « figer » (comme le dit Léo à la fin). C’est la promesse d’accepter que l’amour, comme les saisons, a des cycles, et que pour maintenir l’équilibre, il faut être capable de naviguer ensemble à travers les tempêtes du quotidien et les impératifs de la carrière.

Sylvie : Quel message principal souhaitez-vous véhiculer à travers ce livre ?

Claudien : Le message principal est que l’amour durable ne se trouve pas, il se construit. Le roman déconstruit le mythe de l’amour fusionnel et sacrificiel pour proposer une vision de « l’indépendance partagée ». Il montre que le véritable défi n’est pas la distance géographique (les dix ans de séparation), mais la « distance réelle » (le décalage des vécus) et la capacité à gérer le quotidien, l’ennui et les imperfections de l’autre une fois réunis.

Sylvie : Quelle réflexion espérez-vous susciter chez vos lecteurs après la lecture ?

Claudien : J’espère qu’ils s’interrogeront sur la notion de sacrifice en amour. Doit-on renoncer à soi pour aimer l’autre ? Le livre suggère que non : le seul amour qui ne trahit jamais est celui que l’on se porte à soi-même, et c’est seulement une fois complets individuellement (Léo dans sa musique, Élise dans ses missions humanitaires) qu’ils peuvent former une équipe solide. Je voudrais que les lecteurs réfléchissent à la façon dont ils « cartographient » leur propre avenir.

Sylvie : Comment ce récit peut-il aider chacun à trouver un sens ou un équilibre dans sa propre vie ?

Claudien : À travers les « règles » que Léo et Élise inventent dans la deuxième partie du livre (le droit au désordre partagé, la célébration du fiasco, l’honnêteté brutale), le récit offre des outils concrets. Il montre que l’équilibre n’est pas un état statique, mais un mouvement perpétuel. Trouver un sens, c’est comme la musique de Léo ou les missions d’Élise : c’est accepter les dissonances pour mieux apprécier l’harmonie finale.

Sylvie : L’équinoxe est un phénomène universel, comment avez-vous voulu relier ce symbole aux expériences humaines?

Claudien : J’ai relié ce phénomène cosmique à l’intime. Tout comme la Terre oscille, nos vies oscillent entre le besoin de sécurité (le foyer, l’ancrage) et le besoin de liberté (le voyage, l’ambition). Léo et Élise incarnent cette dualité universelle. Leur voyage de Paris à Nairobi, en passant par Los Angeles et finalement Lisbonne, est une quête pour aligner leur horloge interne sur un temps commun, créant leur propre « saison » au milieu du chaos du monde.

Sylvie : Quelle place accordez-vous à l’espoir et au renouveau dans votre récit ?

Claudien : Une place centrale, mais réaliste. L’espoir n’est pas ici une attente passive d’un miracle (comme lors des dix années de silence), mais une action. Le renouveau s’incarne dans leur choix final de Lisbonne : une ville de lumière, tournée vers l’océan, qui n’est ni le passé de l’un ni le passé de l’autre, mais leur « Terre Promise » commune. C’est l’espoir que l’on peut réinventer sa vie à trente ans, et que l’amour peut renaître, différent mais plus fort, après avoir été brisé ou mis en pause.

Sylvie : Si un lecteur devait retenir une seule phrase ou image de votre livre, laquelle aimeriez-vous que ce soit ?

Claudien : J’aimerais qu’ils retiennent la phrase du Prologue qui résonne jusqu’à la fin : « La foi et l’amour partagent la même grammaire : ce sont des promesses faites à voix basse, qu’on n’est jamais tout à fait sûr de tenir. » Ou bien l’image finale sur le balcon à Lisbonne, où la musique de Léo et les bruits de la ville se mêlent, symbolisant l’acceptation joyeuse de l’imperfection de la vie.

Sylvie : Comment aimeriez-vous que les lecteurs se sentent refermés La promesse de l’équinoxe ?

Claudien : Apaisés. Je ne veux pas qu’ils soient simplement émus par une histoire romantique, mais qu’ils ressentent une forme de sérénité. Comme Léo qui cesse de composer des mélodies torturées pour écrire une berceuse lumineuse, je voudrais que le lecteur sente que les grandes épopées émotionnelles peuvent aboutir à une paix simple et quotidienne. Qu’ils se disent : « C’est possible ».

Sylvie : Quelles émotions ou prises de conscience espérez-vous déclencher chez eux ?

Claudien : J’espère déclencher la prise de conscience que le « foyer » n’est pas un lieu géographique, mais un engagement intérieur (l’ancre invisible). Sur le plan émotionnel, je souhaite qu’ils passent de la nostalgie du passé (les souvenirs de jeunesse) à l’excitation de construire le présent. Qu’ils comprennent que la plus belle aventure n’est pas d’attendre l’autre, mais d’avancer avec lui, pas à pas.

 

Propos receuillis par Sylvie NABINTU

 

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